Quotas : comment la Wallonie évalue ses besoins pour peser sur les sous-quotas francophones

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Le mécanisme des quotas médicaux et sous-quotas francophones reste souvent mal compris. Une réponse récente du ministre Yves Coppieters éclaire le rôle que joue la Wallonie dans ce processus de planification complexe, alors que la Commission de planification des sous-quotas de la FWB doit remettre ses recommandations prochainement.
Depuis près de 30 ans, le nombre de médecins formés en Belgique est régulé par un système de quotas instauré pour éviter la surproduction de diplômés. Chaque année, un contingent global est fixé au niveau fédéral, sur la base d’un avis de la Commission de planification. Ce contingent est ensuite réparti entre les Communautés (francophone et flamande). Mais au sein même de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), la répartition fine entre les universités francophones repose sur un mécanisme spécifique de sous-quotas.
La députée Mathilde Vandorpe (Les Engagés) a récemment interrogé – par le biais d’une question écrite – le ministre francophone de la Santé Yves Coppieters sur la manière dont la Wallonie participe à cette évaluation. Dans sa réponse, celui-ci est revenu en détail sur le processus complexe qui articule plusieurs niveaux de pouvoir et plusieurs critères de planification.
Un mécanisme à trois niveaux
Pour comprendre la mécanique, il faut distinguer plusieurs étapes. Le contingent fédéral est établi par l’Inami, sur avis de la Commission de planification. Ce quota est ensuite ventilé entre Communautés sur base d’une clé de répartition fixée par la Cour des comptes, reflétant des critères démographiques.
La clé de répartition actuelle est d’environ 59,59 % pour la Communauté flamande et 40,41 % pour la Communauté française. Cette dernière ayant souvent produit plus de médecins que permis, un mécanisme de lissage a été mis en place pour réduire progressivement ce surplus.
À l’intérieur de la Fédération Wallonie-Bruxelles, un second niveau de répartition est organisé : il s’agit des sous-quotas attribués à chaque université. C’est ici qu’intervient la Wallonie, en tant qu’entité fédérée ayant la compétence de la santé sur son territoire.
« La Wallonie transmet des données relatives à l’offre médicale sur son territoire afin d’alimenter la Commission de planification des sous-quotas de la FWB », précise Yves Coppieters. Il s’agit notamment d’analyser les besoins par spécialité, par territoire, en tenant compte des indicateurs de pénurie et des priorités de santé publique.
La Commission des sous-quotas de la FWB, qui regroupe des représentants académiques, médicaux et politiques, fonde ses travaux sur ces éléments pour formuler des propositions au gouvernement de la FWB.
« La capacité d’action de la Wallonie est réelle, mais elle s’inscrit dans un cadre global qui reste très contraint. » - Yves Coppieters
Quels critères sont pris en compte ?
Selon la réponse du ministre, la Wallonie transmet plusieurs types d’informations : la densité médicale par région, les projections démographiques, les besoins futurs en soins primaires et spécialisés, ainsi que les réalités locales spécifiques (zones rurales, zones sous-médicalisées).
La Commission de planification nationale utilise aussi des critères quantitatifs comme l’âge moyen des médecins, la répartition des spécialités et les temps de travail. « L’analyse ne se limite pas au nombre brut de médecins, mais intègre également la disponibilité effective et la répartition spatiale des prestataires », rappelle Yves Coppieters.
Ce travail de planification vise à équilibrer à terme l’offre et la demande en soins, même si les effets de la régulation ne se font sentir qu’à long terme.
Un système sous tension
Le débat autour des quotas et sous-quotas reste cependant très vif. D’un côté, certains estiment que la limitation du nombre de médecins a aggravé les pénuries, notamment en médecine générale et dans certaines spécialités critiques. De l’autre, la régulation est jugée nécessaire pour éviter une surpopulation médicale concentrée dans les centres urbains et une désertification rurale accrue.
La FWB comme la Wallonie tentent d’influer sur la répartition en soutenant certaines spécialités déficitaires. Mais elle restent contraintes par le plafond fédéral. « La capacité d’action de la Wallonie est réelle, mais elle s’inscrit dans un cadre global qui reste très contraint », reconnaît le ministre. Une augmentation significative des quotas globaux, réclamée par plusieurs acteurs francophones, dépend d’une décision fédérale à l’heure actuelle plutôt improbable car elle mécontenterait les partenaires néerlandophones, qui s’estiment lésés depuis des années dans le calcul des quotas.
Une nouvelle répartition des sous-quotas
La Commission de planification des sous-quotas de la FWB doit remettre ses recommandations prochainement pour la rentrée académique à venir. Traditionnellement, ces décisions sont prises avant l’ouverture des inscriptions au concours d’entrée en médecine, qui débutent le 1er juin. Il est donc probable que la décision soit rendue publique d’ici fin mai 2025. Cependant, sans annonce officielle, cette date reste spéculative.